mercredi 27 février 2013
une "panique morale" ? un effort de rationalisation
18 janvier 2013
Les règles de la panique morale technologique
La lecture de la semaine provient
du magazine américain Wired (@wired) et de son chroniqueur Clive Thomson (@pomeranian99).
Son titre, "les règles de la panique".
"Quiconque s'intéresse à
l'actualité le sait, commence Thompson, il y a souvent un effet collatéral aux
nouvelles technologies : la panique morale. Facebook engendre le narcissisme !
Ecrire des textos nous rend analphabètes. Ce qui est drôle, c'est que d'autres
technologies ne provoquent rien de cet ordre. Prenez Square, par exemple, qui
permet à chacun de payer par carte de crédit... Il est en train de devenir un
outil mainstream, bouleverse le fonctionnement du petit commerce et la manière
dont des amis partagent une addition dans un bar, mais ne provoque pas grand
discours. Quelle différence ? Pourquoi certaines technologies nous font-elles
peur et pourquoi d'autres provoquent-elles l'indifférence ?
Genevieve Bell (Wikipédia) pense
avoir la réponse. Elle est directrice de recherche chez Intel et étudie depuis
longtemps la manière dont les gens intègrent les nouvelles technologies dans
leur vie quotidienne. Dans un entretien donné en 2011 au blog techno du Wall
Street Journal, elle a proposé une théorie intéressante. Pour provoquer une
panique morale, une technologie doit obéir à trois règles.
1. Elle doit changer notre
rapport au temps.
2. Elle doit changer notre
rapport à l'espace.
3. Elle doit changer notre
relation aux autres.
Prises une à une, ces
transformations peuvent être inquiétantes, mais
si les trois sont réunies, c'est la
panique !
"Combien de fois avons-nous
entendu dire que c'était la fin de petite ville américaine, que c'était la fin
de la famille, que la jeunesse
d'aujourd'hui avait changé
?" demande Bell. Le cycle est très long. Et il a
sans doute débuté il y a environ 2 500 ans, quand le monde de l'écrit a
commencé à décrocher la connaissance de l'espace et du temps et a offert d'autres possibilités
pour les gens de s'adresser les uns aux autres. Cela satisfaisait aux trois règles précédemment citées et
paniqua donc Socrate, qui s'inquiéta de ce que l'écrit allait détruire la
mémoire et l'art de l'argumentation. Mais Socrate n'avait rien vu. Car
les 100 années qui viennent de s'écouler ont été un flux presque continu
d'innovations et de moments de panique. Prenez le téléphone, qui nous a soudain
permis de joindre presque tout le monde, partout, à n'importe quel moment.
Comme une annonce aux peurs déclenchées par les médias sociaux d'aujourd'hui,
des experts ont prédit à l'époque que le téléphone tuerait la communication en
face à face. Mark Twain se moquait de la prétendue frivolité des conversations
téléphoniques entre femmes (à propos des femmes, précise Thompson , Genevieve
Bell explique qu'on peut-être sûr qu'une panique morale va se déclencher quand
les critiques commencent à s'inquiéter de l'impact d'une technologie sur les
femmes et la fragile jeunesse).
Mais les technologies qui
n'affectaient pas ces trois choses n'ont guère déclenché de protestation. Le
fax par exemple. Il a affecté l'espace et le temps, mais pas les relations
sociales. Et je pense, dit Thompson , qu'il a va de même pour Square. Cela dit, ajoute Thompson, cela
ne revient pas à dire que les paniques sont toujours injustifiées. Des réseaux
sociaux centralisés sont un vrai problème en termes de vie privée ; la
cyberprédation, même rare, existe. Mais le vrai problème de ceux qui répandent
la panique est leur conviction que toute ère technologique révolue était l'âge
d'or de la civilité et de la contemplation. Or, c'est faux. Et de façon très
marrante, beaucoup aujourd'hui chantent les louanges d'outils qu'ils
dénonçaient naguère - comme cette plainte contemporaine que l'internet tue
cette interaction tellement pleine d'émotion qu'était le coup de téléphone.
Voici la part utile de tout ça :
on peut se servir des lois de Bell pour déduire quels outils vont provoquer
l'angoisse. Par exemple, dit Thompson, je fais l'hypothèse que la
géolocalisation, la lecture sociale et l'Internet des objets - des objets qui
vont interagir avec nous et entre eux -, provoqueront tous des effets de
panique. Ils affectent notre rapport au temps, à l'espace et à autrui. Ils
arrivent même à me stresser un peu, quand j'imagine comment gouvernement et
entreprise pourraient en abuser. Mais je me calme en étant convaincu que, comme toutes les Cassandre du
passé, j'ai tort de paniquer."
Xavier de la Porte
une panique morale ? le point de vue des technophiles et des technophobes
Technophilie et
technophobie
Technophiles et technophobes
s’opposent sur relations entre monde réel et monde virtuel au XXI° siècle comme
se déchiraient dans la Byzance du VIII° siècle, iconoclastes et iconodules qui
disputaient du rapport entre le monde divin et de ses représentations imagées.
Les technophiles pensent la
technologie déterminante en dernière instance : sur elle, devront se modeler
mentalités et institutions. C’est une force nécessairement libératrice : les
anciennes limitations que nous imposaient nos capacités physiques, mentales ou
sociales seront dépassées.
Pour ses partisans, la
technique va prolonger les capacités de
nos sens et de nos esprits, nous affranchir de la nécessité. Sur l’air du
“demain on pourra...” : demain on pourra communiquer plus vite, accéder
instantanément à l’objet de son désir, explorer toutes les archives, échapper à
toutes les censures, réunir tous les cerveaux, se dispenser de toutes les
pesanteurs de la matière. Ce projet trouve sa forme dans une société de
l’information technicienne et libertaire à la fois. Face à eux, les
catastrophistes pensent en termes de perte : perte d’humanité au profit de la
raison instrumentale, perte de distance critique au bénéfice de la fascination,
perte d’identité dans un monde de virtualité, perte de la réalité remplacée par
le spectacle, perte de la liberté soumise aux logiques techniques, perte de
l’écrit vaincu par l’écran...
Le technophile, certain d’être
dans le sens de l’histoire, ignore généralement les objections, qu’il attribue
à l’ignorance, ou à une mentalité archaïque. Débordant de bonne volonté
pédagogique, il ne manque pas de faire remarquer à son contradicteur qu’il a
tout loisir de s’exprimer voire de créer des communautés virtuelles de
technophobes cyber-ronchons. Il argue
que le cybermonde accueillera tout, y compris son discours critique Il
croit fermement que tout cohabitera avec tout et que le mouvement d’expansion
se poursuivra. Il conçoit le refus des nouvelles technologies comme une affaire
de goût ou de culture, une tendance relativement négligeable et condamnée à
long terme. L’utopiste, habité d’un esprit volontiers messianique, tente de
faire partager l’enthousiasme que lui inspire toute nouvelle croissance du
réseau ou toute annonce d’une innovation technologique.
Le catastrophiste, lui, raisonne
en termes de lutte et s’imagine en résistant au Système. Il dénonce une
idéologie adverse dont il combat l’inauthenticité. Car, s’il craint la perte de
notre autonomie ou de nos capacités, le catastrophiste en attribue une large
part de responsabilité au discours adverse. Il l’analyse souvent comme un
langage de pouvoir, destiné à dissimuler des rapports de force et d’intérêt
particuliers sous forme d’un projet universel.
Technophobie
Ce mot récent désigne une peur de
la technologie (ici prise non au sens de « l’étude des techniques » mais de
l’ensemble de ces techniques, en particulier les NTIC). Technophobie est
souvent utilisé trivialement pour moquer ceux qui sont incapables de se servir
de leur ordinateur, ou développent des craintes irrationnelles à propos
d’Internet. En fait il y a plusieurs degrés dans cette « aversion ».. L’une se
signale par:l’incapacité ou le choix de ne pas utiliser les NTIC dans sa vie. À
ce stade, il s’agit d’un trait de caractère ou de comportement reflétant la
subjectivité d’un individu qui surfe ou pas sur Internet, préfère ou pas écrire
à la main…
Une seconde forme de technophobie
porte un jugement général sur l’utilité des NTIC, surtout Internet en
particulier ; Certains, par exemple, insistent sur les dangers de la Toile –
risque d’escroquerie, prolifération de la pornographie ou des discours
extrémistes, possibilité de pannes en chaîne, d’espionnage de la vie privée… Ou
encore seraient technophobes – à tort ou à raison – ceux qui se montrent
sceptiques sur toutes les merveilles qu’espèrent les « technophiles »,
confiants en l’avènement de la société de l’information : gains de
productivité, nouvelle économie, disponibilité du savoir, émergence d’une
cyberdémocratie dans le « village global », nouvelles possibilités d’expression
et de culture. Cette technophobie-là relève d’une certaine évaluation des
bienfaits ou de méfaits de développements futurs de la technique et de leurs
conséquences sociales, politiques… La différence entre « pour » et « contre »
porte sur la vraisemblance d’événements auxquels tous deux portent globalement
le même jugement.
Resterait alors à définir une
technophobie « de principe » : celle qui rejette la notion même d’une
progression des techniques. Répondraient à cette définition l’attitude de
certains écologistes qui condamnent comme manifestation d’une avidité inutile
toute action de l’homme pour accroître ses pouvoirs.
D’autres dénoncent dans les
nouvelles technologies non pas un accroissement de nos capacités mais un
asservissement ou une aliénation. Ils s’en prennent au caractère inauthentique
du monde des réseaux : fausse égalité, fausse démocratie, faux savoir, faux
rapport avec les autres, bref fausses promesses
et vraie aliénation. Manifestant par là la nostalgie de ce qu’ils
croient perdre: l’expérience commune de la durée et de ses rythmes, celle du
territoire qui permettait à chacun de se situer entre proche et lointain, celle
de la mémoire partagée, celle de l’identité à l’heure des avatars
cybernétiques, des communautés
virtuelles et des choix de vie changeants…
À certains égards, la querelle
des technophiles et des technophobes rappelle des querelles plus anciennes :
pour ou contre l’image dans les religions monothéistes, pour ou contre le
théâtre au XVIII°siècle (la
querelle du spectacle), pour ou contre
les mass media au XX°…
F. B. Huyghe, 6/12/2012, La
médiologie
mercredi 13 février 2013
synthèse : révolution numérique et panique morale.
apleguelte@aureis.fr
Théme :
Parole, conversation, échanges et révolution numérique
Synthèse (20
points)
Révolution
numérique et panique morale
corpus
–
F.
Joannes, « Quand deux magistrats plaisantent sur Twitter pendant une
audience de cour d'assises », le Monde, 28/11/2012
–
F.
B. Huyghe, « Technophilie et technophobie », sur son blog : La
médiologie, 6/12/2012
–
X.
de La Porte, « Les règles de la panique morale technologique », Internet
actu, 18.01/2013
–
Bastien
Vivès, « La vie numérique dans tous ses états », Télérama,
12/11/ 2012
1. analyser
a priori (sans lire les documents) le corpus proposé
2. établir
un tableau synoptique qui tienne compte de tous les points de vue
3. proposer
un plan (vraiment) détaillé de la synthèse, qui tienne compte de tous les
points de vue et de toutes les sources
4.
rédiger
l'introduction complète
Inscription à :
Articles (Atom)